mardi 30 novembre 2010

L’ OpenData en France : perspectives et inquiétudes




L’Open Data, ou la mise à disposition gratuite des données publiques provenant de l’Etat ou des collectivités locales, est désormais un enjeu majeur en passe de créer une nouvelle « bulle » au sein de la net-économie. 

Les gouvernements américains et britanniques ont ouvert la voie en permettant un accès gratuit à un grand nombre d’informations restée longtemps confidentielles ou inexploitées. Là-bas, les initiatives privées visant à exploiter ces données publiques sont encouragées à grands renforts de concours et de subventions. L’intérêt est évident en ces périodes de maîtrise des dépenses publiques : transférer la réalisation et la gestion de services « d’utilité publique » au secteur privé. 

Une appli iPhone pour suivre le trafic urbain en temps réel, un site web recensant les travaux de voiries… Autant d’économies réalisées par les municipalités qui n’auront pas à traiter et diffuser ces informations auprès de leurs administrés, qui en sont de plus en plus demandeurs.

En France, quelques villes (comme Bordeaux, Rennes ou Strasbourg) ont ouvert leurs fichiers et encouragé la création de services Open Data, mais au niveau national l’exploitation gratuite de données publiques à des fins commerciales fait débat. L’APIE (Agence du Patrimoine Immatériel de l’Etat) parait en effet indécise et évoque un OpenData « à la carte » et payant, introduisant une notion de participation financière, quitte à empêcher le développement de nouveaux services par les petites entreprises ou les particuliers. 

Dans cette affaire l’Etat semble vouloir protéger ses données d’un « pillage » par Google, et cherche la formule miracle (une gratuité limitée aux Jeunes Entreprises Innovantes ? une licence de type GPL imposant une rétribution en cas d’usage commercial des données ?) dont on peut craindre au final qu’elle soit surtout hétéroclite, alambiquée et contraignante.

Ce serait regrettable. Un corset juridico-fiscal pourrait en effet étouffer l’ OpenData en France, qui  devrait pourtant constituer un relai de croissance formidable dans le domaine de la communication, des services mobiles, de la géolocalisation, de la typographie, des énergies renouvelables…

Prenons (au hasard) l’exemple des services financiers. Le prometteur Kelquartier.com propose aujourd’hui sous la forme d’un SIG (Système d’Information Géographique) un puissant outil d’aide à la décision dans le cadre d’un achat immobilier. Les sites dédiés comme SeLoger pourraient facilement intégrer ce type de service à leurs moteurs de recherche. Un outil de gestion de finance personnelle (PFM) qui en fonction de l’adresse de l’utilisateur prendrait automatiquement en compte le trafic routier, la distance moyenne domicile-travail ou domicile-école, serait d’autant plus performant et pertinent. On le voit, les applications possibles ne manquent pas.

C’est en ce moment que tout se joue. On a appris cette semaine qu’Etalab, le portail officiel d’accès aux données publiques nationales, ne devrait pas voir le jour avant fin 2011. Il est donc encore temps pour les différents acteurs concernés par l’OpenData en France de faire entendre leur voix. A bon entendeur...


PS : Le Conseil Régional d’Aquitaine à Bordeaux accueillera le 6 décembre 2010 les premières Assises des données publiques en Aquitaine. J’espère vous y retrouver ! 

mardi 2 novembre 2010

La grande offensive de PayPal



« Nous étions en retard en ce qui concerne le paiement sur le web. Nous ne ferons pas la même erreur avec le mobile. » C’est le message martelé par Osama Bedier, le VP de PayPal en charge des nouvelles plateformes, lors du PayPal Innovate 2010 qui s’est déroulé la semaine dernière.

Le message est on ne peut plus clair : Le leader incontesté du e-paiement (90 millions de comptes actifs, dont 7 en France) n’entend pas laisser une once de terrain à la concurrence sur ce nouveau marché. PayPal a donc décidé de faire feu de tous bois et les annonces tonitruantes se sont multipliées lors du salon Innovate. Nous allons tenter d’y voir plus clair et de mesurer notamment l’impact de ces annonces sur le marché et la concurrence.

Paiement sur AppStore, Android Market & App World :
Comme c’était déjà le cas sur Appstore et l’AppWorld de BlackBerry, il est désormais possible de payer ses applications Androïd avec son compte PayPal.

Google Checkout (seul moyen de paiement actuellement autorisé sur Androïd Market)  sera nécessairement impacté. Mais Checkout n’est aujourd’hui présent que dans 30 pays contre 200 pour PayPal. La stratégie de développement de Google implique parfois de petits arrangements…

Accord avec VeriFone :
Grâce à PayPal, VeriFone va booster son module PayWare qui permet aux commerçants et particuliers d’utiliser leur iPhone comme lecteur de carte bancaire.  Ce deal va se traduire par une mise en commun de technologies (PayPal bumping sur PayWare contre scanning carte sur PayPal) et de réseaux de distribution.

Cette annonce est une terrible nouvelle pour Jack Dorsey, le CEO de Square (et créateur de Twitter), qui devait déjà se défendre du manque de crédibilité de sa société vis-à-vis de VeriFone.

Mobile Express Checkout : D’abord sur iPhone puis sur toutes les plateformes mobiles, cette API va permettre l’achat rapide (en 2 clicks) de biens ou services. Via son compte Paypal bien sur, mais aussi directement en scannant sa carte bancaire (merci VeriFone - voir ci-dessus).
 
Amazon avait instauré ce type de système avec son achat « one-click » puis PayPal avait réussi à implanter son Express Checkout (web) sur quelques gros sites marchands. Cette version mobile devrait lui permettre de prendre de l’avance sur Visa et Mastercard qui pourraient annoncer prochainement des systèmes concurrents.   


PayWare de VeriFone
  
PayPal Mobile pour iPhone v.3.0. :
La nouvelle version de l’application iPhone de PayPal, va se voir ajouter une nouvelle fonctionnalité, celle de géolocaliser les commerçants qui acceptent PayPal comme moyen de paiement. Dans l’autre sens, les commerçants pourront diffuser leurs bons de réduction dans l’application PayPal.

Les réseaux sociaux geolocalisés (comme Foursquare ou Dismoioù), qui peinent à trouver d’autres sources de revenus, basent leur modèle économique sur le couponing, auprès des petites enseignes principalement. C’est un pavé dans leur mare que vient de lancer PayPal.

Titanium+Commerce :
Ce partenariat avec Appcelerator va permettre aux (petits) commerçants de réaliser facilement, via une interface web, leur application native Androïd ou iPhone en y incluant le paiement via PayPal. Jusqu’à présent seuls les gros sites marchands disposaient des moyens nécessaires pour développer de vraies applications mobiles de mCommerce. Avec Titanium+Commerce, le petit fleuriste du bout de la rue (disposant de quelques notions de Javascript) pourra investir l’AppStore. 

Avec ce partenariat, PayPal mise sur l’émergence d’un nouveau marché : le mCommerce de proximité. De son coté Appcelerator Titanium gagne en notoriété et en crédibilité par rapport à ses concurrents (Rhodes ou Corona).

PayPal for Digital Goods :
Sur Facebook comme dans de nombreux services communautaires, il sera désormais possible de payer ses biens virtuels via son compte PayPal.

Le succès des pionniers du micro-paiement de biens virtuels que sont Zong et Boku attire les convoitises. La concurrence se structure avec l’arrivée du MPME (micro paiement sur facture opérateur) et maintenant l’offre PayPal.


On le voit, le marché du paiement mobile attire depuis quelques années toutes sortes d’initiatives venant d’acteurs très divers. Il faut dire que les volumes annoncés sont énormes (600 milliards de dollars en 2014 selon certaines estimations).

Si on fait le parallèle avec le boom du eCommerce il y a 10 ans, on se dit qu’il devrait logiquement y avoir de la place pour tout le monde… mais c’est précisément ce que les poids lourds comme PayPal (et bientôt Visa, Mastercard ou Western Union) entendent éviter, en menant des offensives tous azimuts à tous les échelons de la chaîne de valeur.